Felix Mendelssohn The Hebrides, Op. 26, 'Fingal's Cave' (1833)
Ludwig van Beethoven Symphony No. 6 ‘Pastoral’ in F major, Op. 68 (1808)
Paul Hindemith Symphonic Metamorphosis of Themes by Carl Maria von Weber (1943)
[toutes les notes de programme]
15.06.2024 FLAGEY
Beethoven passait généralement l’été à Heiligenstadt, loin de Vienne et de son effervescence. Dans la Pastorale — sa Symphonie n° 6 —, jamais la nature n’avait été au cœur d’un hommage aussi vibrant. Chaque mouvement s’accompagnait d’une description succincte de la finalité de la musique. Beethoven admettait toutefois que sa musique était l’expression des sentiments subjectifs qu’il éprouvait face à la beauté de la nature, et non la véritable expression de la nature. Dans cette symphonie en cinq mouvements, atypique pour son époque, Beethoven dépeint successivement l’éveil à la nature, le doux bruit d’un ruisseau, une joyeuse assemblée de paysans, un orage violent, et enfin l’Action de grâce des paysans qui expriment leur joie et reconnaissance au retour du beau temps.
À l'époque où Beethoven a composé la sixième symphonie, la musique d'illustration avait une histoire qui remontait à plusieurs siècles, les thèmes pastoraux étant particulièrement appréciés non seulement en musique, mais aussi en littérature et dans les arts visuels. Une partie de cette tradition était familière à Beethoven. Il y avait, par exemple, un ensemble de symphonies « caractéristiques ». Les titres des mouvements que Beethoven a fournis dans la Pastorale ressemblent beaucoup à ceux du Portrait musical de la nature, écrit près de 25 ans plus tôt par le compositeur Justin Heinrich Knecht, longtemps oublié. On trouve des modèles plus immédiats dans les oratorios de Haydn, La création (1798) et Les saisons (1801), des pièces très populaires à Vienne à l'époque. Beethoven s'était opposé à certaines des illustrations musicales plus littérales de Haydn, ce qui peut expliquer en partie son ambivalence concernant sa propre représentation de la nature dans la Sixième symphonie.
Beethoven se promenait la plupart des après-midi dans les parcs de Vienne et dans le grand champ situé juste à l'extérieur des murs de la ville. Pendant une partie de l'année, il s'installait dans un village de banlieue comme Heiligenstadt ou se retirait dans une station thermale. (« Rester dans la ville en été est une torture pour moi », a-t-il un jour fait remarquer.) En se promenant, il ne se contentait pas de s'imprégner de la nature, mais il composait aussi. Alors qu'il élaborait ses idées de composition les plus détaillées dans des carnets de croquis grand format à la maison, il avait aussi l'habitude de transporter de petits carnets de poche.
Beethoven est à l'étape la plus prolifique de sa carrière lorsqu'il écrit ces symphonies au cours de sa trentaine. Dès 1803, alors qu'il compose l'Eroica, il esquisse quelques idées qu'il utilisera plus tard dans la Sixième symphonie. Au cours des années suivantes, la composition de la Pastorale a coïncidé avec celle des Quatrième et Cinquième symphonies, ainsi qu'avec d'autres projets majeurs tels que son opéra Fidelio. Le travail le plus intensif sur la Cinquième symphonie a été réalisé en 1807 et s'est poursuivi l'année suivante, tandis que celui sur la Sixième symphonie a suivi au printemps et en été. Beethoven décide de créer les deux œuvres ensemble lors d'un célèbre concert qu'il présente le 22 décembre 1808 au Theater an der Wien.
Felix Mendelssohn (1809-1847) était comme Mozart un enfant prodige. Pianiste remarquable, ce compositeur était aussi poète, peintre et chef d’orchestre. Lorsque Felix eut 20 ans, Abraham Mendelssohn, banquier prospère, estima qu’il était temps d’offrir à son fils le tour d’Europe qui devait couronner son éducation. En avril 1829, Felix Mendelssohn partit donc pour l’Angleterre et visita également l’Écosse, et en particulier la grotte de Fingal. Située sur l’île de Staffa dans l’archipel des Hébrides, celle-ci fut découverte en 1772, reçut le nom d’un héros de la mythologie écossaise et devint l’une des principales attractions touristiques au XIXe siècle.
Les romantiques la considéraient comme une cathédrale gothique, un « temple dédié à Dieu ». « Pour que vous compreniez bien l’effet prodigieux qu’ont eu sur moi les Hébrides, je vous envoie ce qu’elles m’ont inspiré », écrivit Mendelssohn dans une lettre adressée à sa famille à Berlin. Suivaient les premières mesures de L’ouverture des Hébrides : la musique de l’alto, empreinte d’une passion mélancolique, évoque immédiatement les vagues qui, dans un mouvement éternel, viennent se fracasser contre les rochers. Rarement une composition musicale est parvenue à restituer de façon aussi magistrale le jeu incessant de la mer et du vent, auquel se mêlent les cris des mouettes et le soleil transperçant les nuages. Johannes Brahms a également exprimé son admiration pour la musique de Mendelssohn :
Paul Hindemith a composé ses Métamorphoses symphoniques sur des thèmes de Carl Maria von Weber en 1940, après avoir quitté l'Allemagne nazie pour s'établir aux États-Unis. Inspirée par des thèmes peu connus de Carl Maria von Weber, cette pièce orchestrale vivante était à l'origine conçue pour un ballet, mais après des désaccords artistiques, Hindemith l'a transformée en œuvre indépendante. Créée en 1944, elle a été immédiatement acclamée. Hindemith a conservé les mélodies de Weber tout en les modernisant, créant ainsi une musique à la fois familière et innovante.